«Ni le Ramadhan ni Gaïd Salah n’arrêteront la mobilisation du peuple»
Par Meziane Abane
Il ne reste plus rien à dire, vu que tout est décidé par le chef d’état-major, Gaïd Salah. Désormais, penser à une autre feuille de route de «sortie de crise», comme il décrit lui-même la situation politique actuelle, en dehors de la sienne est considéré comme un acte de «trahison», lit-on dans l’article de l’APS qui reprend l’éditorial paru mercredi dans le dernier numéro de la revue El Djeïch.
Le plan de ces derniers, qualifiés par Gaïd de «revanchards», est décrit comme de «vils desseins afin de mettre la main sur le hirak pacifique et de prendre le train en marche». Ce qu’il a exactement fait après la démission de Bouteflika.
Gaïd Salah n’a, finalement, jamais aspiré au débat comme il le prétend. Ou, pense-t-il que les gens l’acclameront et épouseront aveuglément ses démarches comme certains soumis le faisaient à l’époque des Bouteflika? Ses appels au dialogue, notamment quand il critique les formations politiques qui ont refusé de prendre part à la conférence nationale de Bensalah, ne sont que des mots, du vent…
Il se contredit, certes ! Pis, il nous conduit droit vers une dictature militaire où la pluralité politique et le débat contradictoire ne sont qu’utopies. «Décidément, être contre Gaïd Salah est un complot contre la nation! Je suis contre lui, comme l’est la majorité des Algériens qui sortent chaque vendredi et alors! Le chef d’état-major ne reflète aucunement les aspirations du peuple», lance Moussa Naît Amara, militant politique.
Boycott
La solution politique qui donnera suite à la révolution du peuple se complique de plus en plus depuis l’implication de Gaïd Salah qui veut, à tout prix, imposer une élection avec les mêmes têtes du système, les mêmes mécanismes et la même Constitution qui a engendré l’impasse.
En dehors des casernes, ce sont plusieurs partis politiques et personnalités publiques à appeler plutôt à une période de transition ou un processus constituant qu’une élection précipitée qui ne laissera aucunement le temps à la société de s’organiser et n’arrangera que les forces organisées, dont celles de l’armée et du pouvoir.
Une grande partie des Algériens, si ce n’est la majorité, comme ils le font savoir chaque vendredi, campent sur leur position de «boycott de la prochaine élection présidentielle si la revendication principale du mouvement, qui est le départ de tout le système, n’est pas réalisée». «Le pouvoir continue dans sa politique d’il y a 20 ans.
Cette dernière consistait à écarter le peuple des plus importants rendez-vous politiques et électoraux. Maintenir le 4 juillet comme date de la prochaine élection présidentielle, c’est pousser le peuple à boycotter cette élection afin que le pouvoir réussisse à préserver ses intérêts», alerte Messaouda Cheballah, cadre du Mouvement démocratique et social (MDS).
Pas de période de transition pour le chef d’état-major, ce qui le met dans la catégorie suprême de Rab Dzaïr auquel il s’oppose. Les étudiants ont pris d’assaut les rues, mardi, et ont prouvé, contre toute attente, que les conditions difficiles de ce mois de Ramadhan, pour celles et pour ceux qui l’observent, ne pouvaient les empêcher de continuer leur combat et maintenir la mobilisation.
Règlements
Pour la manifestation d’aujourd’hui, certains appellent à garder la journée comme fourchette de mobilisation, d’autres appellent plutôt à manifester durant la soirée.
Ce qui est certain, rien n’arrêtera la détermination du peuple à aller dans le sens de ses aspirations, pour la fondation d’une réelle démocratie, d’un Etat de justice, de droits et de libertés, et aller vers une deuxième république tant clamée depuis le début des manifestations.
Car tout fait croire que Gaïd Salah, qui ne devait même pas s’ingérer dans les affaires politiques, a d’autres aspirations qui ne le concernent que lui; il justifie ses démarches par la relation de confiance existant entre le peuple et son armée.
Après les deux généraux, Tartag et Toufik, ainsi que Saïd Bouteflika – qui n’est qu’un civil et qui ne devrait pas être jugé par un tribunal militaire –, c’était au tou, hier, de la première responsable du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, d’être entendue par le même tribunal, qui l’a mise sous mandat de dépôt. Certains seraient accusés «d’avoir comploté contre l’institution militaire» ou «d’avoir rencontré les comploteurs».
D’autres seraient accusés d’avoir «falsifié la décision du limogeage de Gaïd Salah». Mais dans les deux cas, cela ne concernait ni la révolution du peuple ni ses revendications principales, mais uniquement l’institution militaire ou plutôt la personne même du chef d’état-major.
«Comment peut-on appeler ceci ce n’est un règlement de comptes», s’interrogent des internautes. «Le peuple ne s’est pas soulevé pour des règlements de comptes. Mais pour le changement radical de tout le système et pour le fondement d’Etat démocratique, d’une justice sociale et la concrétisation de l’indépendance de la justice.
Au côté des étudiants, j’appelle les juges, les avocats et les médecins à sortir aussi en masse afin de donner un nouveau souffle à la révolution pacifique du peuple», appelle Djamel Balou, député FFS de Bouira.
Que dire de plus quand tout est décidé par Gaïd Salah ? Peut-il faire face aux 20 millions d’Algériens «sans verser aucune de goutte de sang» comme il ne cesse de le dire dans ses diverses communications?
Un peuple pacifique, qui aspire au changement pacifique et souhaite reprendre sa souveraineté: pouvoir décider sans qu’on le fasse à sa place et choisir sans qu’on lui impose quoi que ce soit. (Article publié dans le quotidien El-Watan, en date du 10 mai 2019)
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Béjaia rejette l’élection présidentielle et Gaid Salah
Par Mohand Yahiaoui
Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté aujourd’hui, pour le 12e vendredi consécutif à Béjaia (Kabylie).
La foule, qui s’est ébranlée de la maison de la culture vers 13h30, a scandé des slogans hostiles au chef d’état-major de l’armée et au système de manière générale: “Gaid Salah dégage!”, “le peuple ne veut pas une transition militaire”.
Les Béjaouis ont également exprimé leur rejet de l’élection présidentielle prévue le 4 juillet, en scandant ”Ulac l’vote Ulac (pas d’élection)”. Outre l’incontournable “Système dégage!”, on peut lire sur les nombreuses pancartes hissées par les manifestants : ”État civil et non pas militaire” et ”NON aux élections organisées par le gang”.
A l’heure où nous mettons en ligne, la manifestation se poursuit au rythme de la chanson d’Oulahlou ”pouvoir assassin“. (Article publié dans le quotidien El-Watan, en date du 10 mai 2019)
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Election du 4 juillet: le peuple insiste sur le «non»
Par Anima Semmar
Bensalah, président intérimaire, contesté et rejeté par le peuple, reçoit Nouredine Bedoui (premier ministre), lui aussi considéré comme illégitime par le mouvement populaire qui demande son départ. Au menu: préparatifs de l’élection présidentielle. Les deux responsables ignorent visiblement le peuple. Le chef de l’Etat souligne «l’impératif de respecter les délais et les échéances prévus par la Constitution»! Techniquement et politiquement, peut-on maintenir cette date du 4 juillet ? Avis de spécialistes.
«Il faut aller au boycott du débat de ces élections et rejeter carrément cette mascarade par tous les moyens pacifiques possibles. Cette situation est pire qu’une provocation, une supercherie, voire suicidaire pour le pays.
Je suis convaincu que personne ne croit au changement par une élection», atteste Rachid Chaibi. Beaucoup d’Algériens et d’Algériennes pensent comme ce militant du FFS. «La population, à Béjaïa, est unanime: on ignore cette élection.
Nous sommes en pleine révolution du sourire afin de changer les choses profondément. Les tenants du pouvoir sont en train d’étudier le report des élections, car l’ensemble des indicateurs et des signes montre un climat non favorable à une élection», déclare Fodil Chaalane, élu premier responsable FFS à Adekar.
Le boycott des élections est la décision de nombreux président d’APC de plusieurs wilayas. Tizi Ouzou et Bejaïa ont notamment été les premières à refuser la révision et la préparation de l’élection présidentielle.
Une quinzaine de présidents d’APC (Assemblées populaires communales) ont suivi par la suite. Aujourd’hui, la situation n’a pas changé, du moins du côté d’Akbou. Mouloud Salhi, président de l’APC d’Akbou (Kabylie, commune liée à Béjaïa), fait aussi partie des maires qui sont dans le mouvement de boycott. «Hier, il y avait une coordination avec l’ensemble des maires des communes de Bejaïa. Pour le moment, nous sommes à l’arrêt en ce qui concerne les élections présidentielles prochaines», précise Mouloud Salhi, président de l’APC d’Akbou. Le gouvernement mise sur une sortie de crise par une élection. «Sortir de cette crise par des élections n’est pas impossible, mais ce n’est peut-être pas la solution à la situation actuelle», explique Louiza Dris Aït Hamdadouche, politologue. Il faut savoir que le peuple refuse catégoriquement cette solution.
Elle ne fait partie de leurs revendications et encore moins de celle de l’opposition. «L’élection s’inscrit dans une solution constitutionnelle à laquelle s’accrochent encore les gouvernants. Toutefois, pour que cette élection puisse théoriquement apporter une solution à la crise de légitimité à cette crise politique, il aurait fallu qu’elle ait les garanties minimums de transparence. Or, elle est effectivement impossible pour la transparence de ces élections, et ce, pour plusieurs raisons», atteste Louiza Dris Aït Hamdadouche. Les raisons se catégorisent selon des aspects techniques et politiques.
Election transparente
«D’un point de vue technique, pour que des élections soit transparente, il faudrait impérativement changer les mécanismes et les instruments de cette élection. Il ne faudrait pas qu’elles soient garanties par le ministre de l’intérieur et les administrations actuelles, encore moins par le chef de l’État actuel ni avec le fichier électoral actuel ni avec la loi électorale actuelle», explique-t-elle.
En d’autres termes, on a besoin d’une instance indépendante d’organisation des élections. Ce qu’hélas nous n’avons pas. Pour cela, ce qui doit être fait, selon Louiza Dris Aït Hamdadouche, consiste en une révision du fichier électoral, la promulgation d’une nouvelle loi électorale, et ce, avec des acteurs neutres et crédibles.
Tous ces éléments n’ont pas été réunis. Pour ce qui est de la révision de la loi électorale, elle fait partie des aspects techniques qui n’ont pas été réalisés aujourd’hui et qui ne le seront manifestement pas d’ici le 4 juillet. Maintenant pour réaliser des élections transparentes, un climat de sérénité et d’apaisement est nécessaire. «Une élection a besoin que la population se mobilise autour de partis politiques, autour de programmes, autour d’idées. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, car les lois actuelles qui régissent la liberté individuelle et collective ne permettent pas une libre expression et une libre mobilisation de la population», ajoute Mme Dris Aït Hamadouche.
En effet, depuis le 22 février et jusqu’à aujourd’hui, le mouvement populaire ne fléchit pas, notamment en ce mois de Ramadhan, alors que le gouvernement s’attendait «peut-être» à ce qu’il se décourage. Les revendications populaires sont toujours aussi claires et le gouvernement fait toujours la sourde oreille. Dans les slogans des manifestants, il n’y a pas d’élection en vue.
«Ce n’est pas le moment de parler d’élections. Avant d’en arriver là, nous devons écouter les revendications du peuple qui sont unanimes. Ce gouvernement n’est pas légitime et ces élections le sont encore moins. Les partisans du pouvoir sont déterminés coûte que coûte à éviter le passage à la transition du pouvoir», déclare Mustapha, étudiant en génie civil à l’université de Bab Ezzouar. Les manifestations orchestrées se sont toujours déroulées dans le pacifisme et le respect d’autrui.
Aucun débordement n’a officiellement était enregistré, preuve que le peuple mise sur un changement politique complet et dans la sérénité. Ce qu’il est important de préciser c’est pourquoi il est «impossible» d’organiser des élections le 4 juillet prochain.
Le problème n’est pas dans ce court délai, mais dans comment vont-elles se dérouler. Et, surtout, qui va se présenter. «Mais, avant de déboucher vers des candidats potentiels, il est nécessaire d’amorcer une transition. Cette période de transition a pour but d’ouvrir l’espace politique pour permettre aux Algériens de s’organiser et se mobiliser autour d’une force politique porteuse de projet. Pour le moment, on ne peut pas dégager de candidats potentiels pour une élection, car nous n’avons pas encore ce contexte et cet environnement qui permettent de libérer les initiatives politiques», affirme Louiza Dris Aït Hamdadouche.
Qui va aller voter?
Au cas où nous arrivons à un environnement propice à une éventuelle élection, le peuple algérien va-t-il y participer? «Aucune élection n’est impossible, sauf si le peuple ne veut pas y participer. Mais avant d’en arriver là, il faudrait d’abord faire la différence entre ce qu’on appelle le peuple, car il y a le corps social que l’on trouve dans le hirak et le corps électoral, celui qui va réellement voter. Le passage du corps social au corps électoral va nécessiter des réductions. Ces dernières s’inscrivent dans les conditions que pose la loi électorale pour être électeur, entre autres être de nationalité algérienne, avoir plus de 18 ans, être ni failli ni condamné, mais avant tout être inscrit sur une liste électorale», explique Fatiha Benabbou, constitutionnaliste.
De manière rationnelle dans ce mouvement de protestation, il y a énormément de jeunes et beaucoup ne sont pas inscrits sur les listes électorales. D’après Fatiha Benabbou, nous sommes en face d’un drame dans ce hirak.
La constitutionnaliste affirme: «Le risque, c’est que ces jeunes ne fassent pas partie du corps électoral. Dans ce cas, il y aura une réduction drastique du corps social au corps électoral. Parmi ce corps électoral, il faut réintroduire les personnes que le hirak écarte de l’élection, comme les nationalistes du FLN, les militants du RND, ceux des autres partis politiques qui ne participent pas au mouvement populaire, mais qui vont aller voter. Juridiquement, le corps social, c’est l’opinion publique. Il reste et il demeure celui qui permet d’infléchir les politiques. Néanmoins, celui qui va véritablement participer et décider, c’est finalement le corps électoral.» Dans ce corps social, cet écart représente les jeunes marginalisés, les femmes au foyer, etc. (Article publié dans le quotidien El Watan, en date du 10 mai 2019)
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Convoquée comme témoin, Louisa Hanoune placée sous mandat de dépôt
Par Salima Tlemcani
Convoquée comme témoin par le tribunal militaire de Blida, Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs, a été placée en détention après plus de cinq heures d’audition par le juge chargé du dossier de Saïd Bouteflika et des deux généraux Toufik et Tartag.
Le PT appelle à «l’annulation de toutes les charges retenues» contre elle et qualifie cette mesure d’«acte antidémocratique dirigé contre la révolution du 22 février» L’information est tombée hier comme un couperet. La secrétaire générale du PT, Louisa Hanoune, a été placée, hier, sous mandat de dépôt par le juge du tribunal militaire de Blida chargé du dossier de Saïd Bouteflika, frère-conseiller du président déchu, du général Mohamed Mediène dit Toufik, ancien patron de l’ex-Département de renseignement et de sécurité (DRS) et du général Bachir Tartag, ex-coordinateur des services secrets, placés en détention, dimanche dernier pour «complot contre l’autorité de l’Etat et l’autorité militaire».
La veille, elle avait reçu une convocation du magistrat militaire pour être entendue en tant que témoin dans cette affaire. L’audition a duré plus de cinq heures avant que la décision de son incarcération soit rendue publique.
Fuites
Mais, dès la matinée, des signes précurseurs laissaient planer le doute sur le sort de la secrétaire générale du PT. D’abord cette information fuitée de sa convocation par le tribunal militaire publiée en boucle par une chaîne de télévision privée avant même que la mise en cause n’arrive à Blida. Quelques heures après, c’est la télévision publique qui est chargée de diffuser des images prises de l’intérieur du tribunal militaire, montrant l’arrivée de Louisa Hanoune sous plusieurs angles.
Avant même que l’audition se termine, une chaîne privée a annoncé la mise sous mandat de dépôt, suscitant un vent de panique dans les rangs du Parti des travailleurs. En tout cas, la mise en détention de Louisa Hanoune est un acte gravissime qui nous achemine vers la dictature.
Comment le chef d’un parti politique peut-il être convoqué en tant que témoin par un tribunal (fut-il militaire) donc sans être assisté par son avocat ? Comment peut-il se retrouver en prison aussi facilement ? Louisa Hanoune se savait ciblée depuis un certain temps, notamment à travers les violentes attaques sur les réseaux sociaux, les filatures, les compagnes haineuses menées par certaines chaînes publiques, mais elle a refusé de faire état de ses craintes aussi bien aux médias qu’à ses proches collaborateurs.
Cible
Mardi dernier, des officiers de la Direction de la sécurité intérieure (DSI) dépendant du ministère de la Défense, l’avaient dirigé vers leurs bureaux pour être entendue durant près de cinq heures, mais elle n’a pas voulu polémiquer sur ce sujet, pensant que le dossier était clos. Même en recevant la convocation du juge du tribunal militaire mercredi, elle a refusé de rendre publique l’information, surtout qu’elle était censée être entendue en tant que «témoin à la demande de la défense», tel que précisé sur le document qui lui a été délivré.
Pourtant, tous les avocats constitués dans ce dossier avec lesquels nous nous sommes entretenus ont déclaré n’avoir «pas introduit» cette demande. En tout cas, la mise sous mandat de dépôt de Louisa Hanoune, ne fera qu’exacerber la contestation et la crainte pour les jours à venir.
Dérive
Si Louisa Hanoune a été embarquée dans cette affaire de «complot contre l’Etat et l’armée», il faudra s’attendre à ce que tous les chefs de partis et toutes les personnalités (elles sont nombreuses) qui étaient reçus par Said Bouteflika, à la présidence de la République, durant l’automne dernier à la recherche d’une solution à la crise que vit le pays connaissent le même sort.
Pour le parti des travailleurs, qui s’exprimait hier à travers un communiqué du secrétariat permanent du bureau politique, on reproche à Louisa Hanoune sa position «contre toutes les manœuvres visant à contourner la révolution populaire exigeant le départ du système».
Pour le bureau permanent, la détention de Louisa Hanoune est «une dérive gravissime, un acte de criminalisation de l’action politique indépendante et l’expression d’une volonté de mise au pas des militants et activistes par le pouvoir de fait». Il s’agit là d’une mesure, ajoute le même document, «contre le peuple algérien et sa mobilisation révolutionnaire entamée depuis le 22 février 2019».
De ce fait, le bureau permanent appelle à «l’abandon de toutes les charges retenues contre elle et à sa libération inconditionnelle» et exhorte «tous les Algériens et ceux qui partagent ou nos positions de s’opposer à cet acte antidémocratique dirigé contre la révolution du 22 février. Avec cette arrestation, c’est une nouvelle étape qui s’ouvre». . (Article publié dans le quotidien El Watan, en date du 10 mai 2019)
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Communiqué du PST
L’arrestation aujourd’hui de madame Louiza Hanoune, Secrétaire Générale du Parti des Travailleurs, intervient dans un contexte de répression et de velléités d’atteintes aux libertés démocratiques. Le pouvoir militaire de fait actuel, incarné par le chef d’Etat Major M. Gaïd Salah, semble s’enliser dans une campagne de purges et de règlement de comptes dans une perspective de recomposition du pouvoir mais dans la continuité du régime. L’opacité dans laquelle s’opèrent ces arrestations et l’instrumentalisation évidente de l’appareil judiciaire civil et militaire n’augurent rien de bon pour l’avenir de nos droits et nos libertés démocratiques.
Les millions d’Algériens et d’Algériennes qui occupent les rues de tout le pays depuis le 22 février, dénoncent notamment l’autoritarisme de 20 années de dérive monarchique du régime. Ils n’accepteront pas de nouveau l’autoritarisme et la répression quels que soient les motifs.
Pour le PST, nos divergences multiples et profondes avec le Parti des Travailleurs, ne nous détourneront pas en ces moments particuliers de l’impérative dénonciation de la répression et de la manifestation militante de notre solidarité.
Le Secrétariat National.
Alger le 9 mai 2019
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L’armée s’en prend aux partisans de la transition
Par Kamel Amarni
Dans l’éditorial de la revue El Djeïch intitulé «Clairvoyance et sagesse pour faire avorter tous les complots», le Haut Commandement de l’Armée nationale populaire s’en prend violemment à ceux qu’il accuse d’être derrière «ces complots», mais aussi à l’opposition et à certaines «voix» qui rejettent «toutes les solutions disponibles et possibles». Dans cet éditorial qui reprend les grands axes de la position de l’ANP défendue régulièrement par le chef d’état-major, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah, faisant clairement allusion au général Toufik, surtout, mais aussi à des partis de l’opposition et à certaines personnalités, on lira en effet que «notre pays traverse une crise que certains parmi ceux qui ont vendu leur conscience, qui n’en ont cure de l’intérêt supérieur du pays et qui vont même jusqu’à tramer des complots contre la patrie, voudraient voir perdurer en rejetant toutes les solutions disponibles et possibles, à même de permettre à notre pays de surmonter cette épreuve, et donc de couper la route aux aventuriers qui concoctent des plans et projettent de les exécuter à tous les échelons, dans le but d’entraîner le pays vers l’anarchie et le chaos».
Reprenant les déclarations précédentes sur ce point précis de Gaïd Salah, l’éditorialiste d’El Djeïch ajoutera: «Aujourd’hui, nul n’ignore que les exécutants de ce plan machiavélique, ceux qui leur ont confié cette tâche et ceux qui gravitent dans leur giron ont attendu, durant toutes les années passées, la moindre occasion pour le mettre à exécution en ayant recours à diverses voies et moyens.» Un peu plus précis encore, l’éditorialiste poursuit: «Après que le peuple algérien les a démasqués et rejetés fermement et définitivement, ils ont fait de certains canaux d’information connus et des réseaux sociaux un moyen pour tenter de réaliser des agendas douteux, en menant des campagnes méthodiques autant que tendancieuses dans le but d’abuser l’opinion publique pour distiller leurs mensonges et leurs élucubrations dans une vaine tentative de porter atteinte au lien existentiel et étroit qui unit le peuple à son armée, d’ébranler sa cohésion et la confiance mutuelle qui les anime.»
S’en prenant à certaines parties dans l’opposition, l’éditorial d’El Djeïch affirmera: «Aussi, il n’est pas surprenant de voir que ce sont les mêmes voix qui avaient sollicité l’intervention de l’armée dans le champ politique durant les précédentes décennies qui tentent aujourd’hui, sournoisement, de l’entraîner sur cette voie en cette étape cruciale. Ceci par des voix multiples dont la plus courante est de faire pression à travers «des messages ouverts», «débats», «avis», et «points de vue» publiés dans les colonnes de certains médias, appelant à une période de transition calquée à leur mesure, durant laquelle ils se conduiront comme il leur plaira et feront passer leurs projets et les agendas de leurs parrains qui vouent à l’Algérie et à son peuple une haine et une rancœur infinies.»
Aussi, lit-on encore dans cet éditorial, et «afin de concrétiser leurs vils desseins, ces revanchards tentent de mettre la main sur ce ‘’Hirak’’ pacifique et de prendre le train en marche pour servir leurs intérêts étroits en s’autoproclamant porte-parole du peuple, dans l’espoir de brouiller les cartes et de semer la confusion. Dans leurs manœuvres criminelles, ces mêmes parties n’oublient pas de lancer des campagnes féroces à travers certains porte-voix qui véhiculent toute leur rancœur à l’encontre de l’ANP, en lui reprochant son attitude patriotique et novembriste dont elle ne s’écartera jamais.»
L’éditorialiste d’El Djeïch assènera même cette grave accusation: «Le comportement hystérique qui a fait perdre le nord à ces parties est essentiellement dû au refus catégorique du Commandement de notre armée de verser une seule goutte de sang de notre peuple, depuis le début des marches pacifiques, et sa détermination à faire barrage à tous ceux qui tenteraient d’ébranler la stabilité du pays et d’attenter à l’unité du peuple» rappelant, au passage, que cette position avait également été réaffirmée par Gaïd Salah. Dans ce même ordre d’idées, l’éditorial d’El Djeïch évoquant la grande campagne «mains propres» en cours depuis quelques jours, fera cette autre remarque, en citant une autre déclaration du chef de l’état-major: «(…) ces mêmes parties tentent de faire accroire aux Algériens que cette démarche de la justice de dépoussiérer les dossiers de corruption intervient sur ordre de l’institution militaire, dans une tentative sournoise d’entraver l’action de la justice et de saper sa détermination à continuer d’accomplir les missions qui lui sont assignées, conformément au droit et aux lois de la République. Comment expliquer sinon que dès le lancement par la justice de l’opération d’investigation sur ces dossiers, une campagne de dénigrement a vu le jour émettant des doutes sur le sérieux de l’opération et jetant le discrédit sur l’intégrité de la justice, en prétendant qu’il s’agit d’une campagne de vengeance et de règlement de comptes.»
L’éditorialiste conclura par réaffirmer la détermination de l’armée. «En tout état de cause, les projets et plans concoctés par cette poignée de comploteurs sont inéluctablement voués à l’échec, y compris celui visant à briser la cohésion entre le peuple et son armée. Pour sa part, l’ANP demeurera aux côtés du peuple jusqu’à ce qu’il atteigne ses objectifs et concrétise le changement attendu, comme elle demeurera mobilisée en permanence pour accompagner le peuple et le protéger des agissements d’individus dont le temps a fini par dévoiler les contours du vil complot qu’ils ont mis en œuvre contre la patrie des chouhada.» (Article publié dans Le Soir d’Algérie, en date du 9 mai 2019)
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Les syndicats autonomes préparent leur feuille de route
Par Nawal Imès
Les treize syndicats affiliés à la Confédération des syndicats autonomes (CSA) étaient en conclave hier. C’est la deuxième réunion que tiennent les syndicats en une semaine.
La CSA avait d’ailleurs maintenu ouverts ses travaux depuis février dernier. Objectif: décider des actions à entreprendre afin de non seulement soutenir le processus révolutionnaire en cours mais surtout exercer une pression supplémentaire sur les détenteurs de la décision.
Faisant sien le slogan «aucune voix ne peut supplanter celle du peuple», la Confédération des syndicats autonomes étudie les propositions émanant de ses treize membres. Ils sont nombreux à vouloir opter pour des mouvements de grève, une manière, disent-ils, plus pratique et plus efficace pour mettre davantage de pression. Il est également question d’initier une journée ouverte aux différents acteurs de la société civile afin de discuter des perspectives du large mouvement de protestation.
Dès ce samedi, la CSA initiera une première rencontre préliminaire de la société civile au siège du Cnapeste pour débattre d’une proposition de sortie de crise.
Le débat sera élargi aux partis politiques et aux personnalités nationales. Il s’agit pour les syndicats autonomes de travailler sur une feuille de route de sortie de crise qui sera soumise à un large débat.
La Confédération des syndicats autonomes avait déjà opté pour une journée de grève qui avait touché les secteurs de la santé, de l’éducation mais également l’administration et l’enseignement supérieur puisqu’elle est composée de l’Union nationale du personnel de l’éducation et de la formation (Unpef), le Syndicat national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l’éducation (Cnapeste), le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest) et le Syndicat national des travailleurs de l’éducation (SNTE), l’Intersyndicale de l’éducation nationale (CIEN), le Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef), le Syndicat des imams et le syndicat national autonome des postiers (SNAP), le Conseil des lycées d’Algérie (CLA), le Conseil national des enseignants supérieur (Cnes) et le Syndicat national des vétérinaires fonctionnaires de l’administration publique (SNVFAP).
Ces mêmes syndicats avaient battu le pavé à l’occasion de la journée du 1er Mai. La marche à laquelle ils avaient appelé avait été réprimée.
Les travailleurs représentant plusieurs secteurs avaient été empêchés de marcher à Alger et avaient été dispersés en usant de gaz lacrymogène. En dépit d’un dispositif de sécurité impressionnant, ils avaient été nombreux à rejoindre la Grande-Poste.
Les syndicats autonomes engagés depuis le début du mouvement populaire ne voulant surtout pas rester en marge de cette dynamique, entendent non seulement l’accompagner mais influer sur le cours des événements. (Article publié dans Le Soir d’Algérie, en date du 9 mai 2019)
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