Grèce. Un accord avec les créanciers qui emprisonne SYRIZA dans le social-libéralisme

Yanis Varoufakis et Alexis Tsipras
Yanis Varoufakis et Alexis Tsipras

Déclaration du Red Network (DEA et APO)

Le programme de «réforme» déposé par Yanis Varoufakis et par le gouvernement dirigé par SYRIZA [en «complément» de l’accord du 23 février] révèle la vérité sur l’accord entre le gouvernement et les bailleurs de fonds, représentés par l’Eurogroupe: c’est le renoncement de SYRIZA qui se situe aux limites d’une politique sociale-libérale.

Cet accord annule la possibilité de mettre en œuvre les engagements de Thessalonique (14 septembre 2014), il inverse le sens de décisions de la Conférence de SYRIZA (juillet 2013) qui indiquait l’annulation du mémorandum et des lois qui l’accompagnaient comme une première étape vers le renversement d’ensemble des brutales politiques d’austérité.

Plus précisément

En ce qui concerne les privatisations qui forment le noyau de la stratégie néolibérale.

Le gouvernement s’engage à ne pas «supprimer les privatisations qui ont été parachevées» et à «respecter le processus conformément à la loi» pour les mises au concours qui ont été lancées, alors que le pire réside pour les «nouveaux cas» dans la méthode impliquant des «baux à long terme et des partenariats publics et privés». Cela revient donc à une acceptation généralisée des privatisations qui se situe à l’opposé d’une politique fixée de longue date par SYRIZA.

Pour ce qui a trait au «marché du travail».

Les «réformes» proposées impliquent l’annulation de l’engagement électoral clair de rétablir le salaire minimum (751 euros), indépendamment de la négociation avec les créanciers. Est adopté un «changement» (?) baignant dans le brouillard politique. Pour le salaire minimum, les changements portent sur «l’ampleur et le calendrier» (!) qui seront sujets à «consultation avec les partenaires sociaux (!!) et les institutions européennes et internationales (!!!), (…) à la lumière des développements de la production et de la compétitivité (!!!)».

Cela revient à reporter la restauration du salaire minimum [au niveau de 2009] sine die. Et, pire encore, est adopté un processus inacceptable de négociation salariale et des critères relevant de la plus libérale des social-démocraties.

La question cruciale de restaurer le pouvoir des conventions collectives: la proposition est minée car elle est associée à certaines des «meilleures pratiques de l’UE» (?) et cherche à «bénéficier de l’expertise de l’OCDE».

Nous rappelons que le «savoir-faire» de ces organisations internationales – qui sont restées immobiles et silencieuses au cours des 20 dernières années de l’agression néolibérale du Capital – s’est avéré extrêmement actif dans l’érosion progressive des droits du travail par une succession de nouvelles idées dites intelligentes. «Dans le programme sera inclus l’engagement «à une nouvelle approche progressive dans les conventions collectives incluant l’équilibre (!) entre la flexibilité (!!) et la justice». Au cours des 20 dernières années, beaucoup ont cherché l’équilibre entre la flexibilité et la sécurité (la flexi-sécurité), mais personne n’a trouvé autre chose que la marche forcée de la flexibilité ou de l’élasticité…

Pour ce qui relève de la politique fiscale, les engagements de Thessalonique abrogeaient l’ENFIA [impôt expropriateur sur l’immobilier], la xaratsi [terme renvoyant à un impôt injuste sous l’occupation ottomane] sur le fioul domestique et pour la réinstallation du seuil de non-imposition pour les revenus annuels inférieurs à 12’000 euros [actuellement le seuil est fixé à 5000 euros]. Or tout s’est volatilisé. Si la cible absolument correcte de la lutte contre l’évasion fiscale et la fraude aux cotisations sociales – qui doit clairement être dirigée contre le capital – n’est pas en relation étroite avec des mesures d’allégement fiscal pour les travailleurs, les retraités et les couches populaires, cela revient simplement à poursuivre les politiques d’austérité.

Sur la question des banques, la conférence de SYRIZA s’était prononcée pour leur mise sous examen public, même si les modalités n’étaient pas précisées. Or, est adoptée une mise sous surveillance des prêts «selon des modalités qui tiennent pleinement compte de la capitalisation (!) des banques» et même les ventes aux enchères de la résidence principale sont placées sous l’épée de Damoclès de «la coopération avec la direction des banques et des institutions bancaires (!)».

Ce programme de «réformes» constitue la preuve qu’il conduit vers un brusque tournant impliquant le remboursement de la dette comme une condition faite sienne par le gouvernement. Il marque le passage à une position où nous cherchons à résister à l’austérité, mais cela obligatoirement dans le cadre de l’acceptation des règles de l’UE (Union européenne) et de l’euro.

Contre l’accord avec l’Eurogroupe (ministre des Finances) et le programme «de réformes» [proposé par le gouvernement grec], les organisations et les membres de SYRIZA, la gauche, le mouvement syndical et les mouvements sociaux de résistance doivent trouver la force de répondre: NON!

Et puis garder une attitude d’indiscipline, autrement dit une attitude de lutte de la classe ouvrière et des couches populaires pour briser ce corset qui est imposé à une politique anti-austérité concrète.

Pour les membres et les organisations de SYRIZA, des tâches spécifiques sont à l’ordre du jour. Le retour immédiat aux politiques qui reposent sur trois piliers principaux:

a) l’élimination des mémorandums et des mesures d’austérité qui les accompagnent;

b) aucun sacrifice pour l’euro;

c) une politique de la gauche radicale s’appuyant sur les décisions de la conférence (de juillet 2013) et les engagements de Thessalonique (en septembre 2014).

Ce sera une lutte pas contre mais pour sauver le projet politique de «gouvernement de la gauche.» Parce que l’accord avec l’Eurogroupe et les engagements pris aujourd’hui (25 février) mèneront dans la période de quatre mois du «pont» (plan-relais) à un affaiblissement des relations de SYRIZA avec la base sociale qui l’a conduit à la victoire politique (du 25 janvier). Et cela va accroître l’appétit des ennemis locaux (de Grèce) et internationaux pour initier une bataille avec l’objectif de renverser le gouvernement. Le temps est court… (25 février 2015; traduction Antonis Martalis)

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