Pour une Europe des salarié·e·s face à l’Europe des trusts
 
 

NON
au dumping salarial et social


«Pour ou contre l’Europe»: l’establishment politique et médiatique français ne voulait laisser que ce choix aux citoyens et citoyennes. Ces derniers ont refusé ce faux dilemme. Le 29 mai 2005, ils ont dit NON à la Constitution européenne, donc non à une Union européenne (UE) qui n’est pas démocratique et où règnent le chômage, le dumping social et salarial. Par là même, ils ont dit OUI à une Europe démocratique aux plans politique, social et économique.

Le 25 septembre 2005, en Suisse, la même opération sera faite par le patronat et les autorités: «Pour ou contre la libre circulation» entre la Suisse et l’UE à 25.

En réalité, la question est autre: OUI ou NON au dumping salarial et social? En votant NON, les salarié·e·s riposteront à une pratique patronale répandue, qui les précarise, réduit leurs revenus et les divise.

Libéraliser la circulation des salarié·e·s nécessite, conjointement, une harmonisation vers le haut des droits sociaux et syndicaux.

Or, les mesures d’accompagnement proposées par le Conseil fédéral ne répondent pas à cette exigence. Pourtant, l’offensive néolibérale accroît le besoin de disposer de droits renforcés, en Suisse comme dans l’UE.

 

Une authentique libre circulation exige d’efficaces mesures d’accompagnement, de véritables droits sociaux et syndicaux

La Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 affirme que toute personne «a le droit de circuler librement» (art. 13). Ce droit doit être défendu. Afin de se concrétiser pour les salarié·e·s, il doit être indissolublement lié au «droit au travail à des conditions équitables et satisfaisantes, au droit à la protection contre le chômage, au droit à la sécurité sociale…» (art. 22, 23).

Que visent les milieux économiques qui font campagne pour leur «libre circulation»? Le président des hôteliers zurichois fournit la réponse: «Nous payons aujourd’hui des employés 3150 francs, qui travailleraient aussi pour 2000 francs.» (Blick, 31.5.05) Le patron d’un grand palace pose le problème à l’échelle de l’Union européenne (UE): dans l’hôtellerie suisse, le salaire minimum de 3150 francs pour un employé non qualifié est beaucoup trop élevé par rapport au «marché européen qui le place à environ 2500 francs» (Blick, 1.6.05) Pour lui, il faut des salaires eurocompatibles, à la baisse.

Le secrétaire d’Etat à l’économie, Jean-Daniel Gerber, déclare: «Oui, les salaires nominaux vont baisser.» (Le Temps, 24.5.05) Le conseiller fédéral Joseph Deiss met les points sur les i: «La libre circulation constitue un pas considérable pour la flexibilité» des salaires et des heures de travail. L’économiste Vontobel écrit: «Pour les employeurs, il est plus facile que jamais de remplacer des salariés plus chers par d’autres meilleur marché (SonntagsBlick, 24.10.04) Les contrôles effectués dans quelques secteurs révèlent de nombreux «abus». Or, ces contrôles n’existent même pas dans de très nombreuses branches.

Pour Peter Hasler, directeur de l’Union patronale suisse: «Des salaires minimums fixes conformes aux revendications syndicales sont une erreur quand on veut intégrer des personnes dans le marché du travail.» (Blick, 20.5.05) Quant aux chômeurs et chômeuses, «manquant de qualifications», Hasler a la solution: «Dans l’idéal, il faut créer des emplois qui n’existent pas, comme cireur de chaussures ou porteur.» (Le Temps, 26.5.05)

Voilà ce que veulent ceux qui entonnent le refrain: «libre circulation ou catastrophe».

•    Face à ces pratiques des employeurs – couvertes par les autorités – il est indispensable que les salarié·e·s disposent de droits et de protections efficaces. Ce sont des instruments nécessaires pour se défendre collectivement, pour freiner une mise en concurrence. Le patronat utilise le chômage durable pour opposer les salarié·e·s les uns aux autres. La sous-enchère salariale et le chantage à l’emploi peuvent nourrir les heurts xénophobes entre diverses couches de salarié·e·s.

Sans de tels droits collectifs, il sera encore plus difficile de commencer un mouvement de résistance qui rejoigne celui de salarié·e·s de l’ensemble de l’Europe. En effet, pour contrer la sous-enchère salariale et sociale à l’échelle européenne, il faudra obtenir, par étapes, un socle de mêmes droits sociaux: en instituant des salaires minimaux par branche et qualification; en instaurant des droits du travail protecteurs, notamment contre les licenciements.

Le vote du 29 mai en France, le grand débat en Allemagne sur le dumping salarial entrouvrent la porte pour de telles revendications.

•    Les «partenaires sociaux» – les organisations patronales et l’Union syndicale suisse (USS) – se sont mis d’accord sur des mesures d’accompagnement à l’occasion de l’élargissement de l’UE à dix nouveaux pays. Ces mesures sont censées éviter un «dumping salarial sauvage». Le Parlement les a adoptées en décembre 2004. Ces mesures d’accompagnement sont totalement insuffisantes.

De très nombreux salarié·e·s sont dès lors «sceptiques». Ils expriment «des craintes», comme le reconnaît le président de l’USS, Paul Rechsteiner. La réalité leur donne raison.

En effet, se satisfaire de ces mesures d’accompagnement ne permettra pas de freiner l’accentuation du dumping salarial et aussi social (attaque contre l’AI, l’assurance maladie, les droits des chômeurs, les requérants d’asile).

Notre NON s’accompagne de propositions concrètes pour le présent et l’avenir (voir p. 4). Les salarié·e·s et les syndicalistes peuvent s’en emparer pour en débattre et agir.

De telles propositions peuvent servir à combattre la démagogie xénophobe de l’UDC qui est aussi à la tête des attaques antisociales et antisyndicales.

 
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