Construire la solidarité internationale:
un long combat
Le samedi 29 janvier
s’est tenu à Lausanne une rencontre prévue depuis plusieurs semaines avec des
collègues d’autres sites de la multinationale FiltronaBunzl. Il a mis en
évidence à la fois l’importance fondamentale d’une solidarité internationale,
ainsi que l’énorme travail qu’il reste à faire pour la construire.
Comedia avait invité des salarié·e·s ainsi que des syndicalistes de quatre sites du
groupe Filtrona: Jarrow, en Grande-Bretagne, siège de la maison mère, Reinbeck,
dans le nord de l’Allemagne, Rovereto et Salerne en Italie. Les collègues
britanniques n’ont finalement pas donné suite à l’invitation. Les membres du
comité d’entreprise de Reinbeck, empêchés, se sont fait représenter par Holger Artus,
président suppléant du secteur édition du syndicat Ver.di. Les collègues de
Rovereto, où Filtrona a fermé début 2004, étaient représentés par un
travailleur de l’entreprise ainsi que par un responsable de la confédération
syndicale CGIL. Quant à ceux de Salerne, au sud de l’Italie, ils étaient
absents. Ce tour d’horizon des présents et des absents est, à lui seul
révélateur. Après que comedia,
avec l’appui de l’UITA – l’Union internationale des travailleurs de
l’alimentation, représentée lors de ce meeting –, a diffusé début janvier sur
plusieurs sites de Filtrona un tract informant de la lutte menée à Crissier, la
direction internationale du groupe a lancé une contre-offensive, et a, comme
l’on dit, «resserré les boulons». Ce qui, de toute évidence, n’est pas resté
sans effet.
Cela dit, les informations apportées par les collègues
de Rovereto et d’Allemagne étaient très instructives. Elles montrent clairement
que BunzlFiltrona a une stratégie internationale, dont les lignes de force sont
tracées bien à l’avance. La multinationale a regroupé en son sein des
entreprises précédemment concurrentes, comme l’usine de Rovereto et celle de
Baumgartner de Crissier, pour piller leur savoir-faire et leur carnet de
commandes, tout en jouant sur leurs rivalités pour freiner toute réaction
convergente. A Reinbeck également, le secteur filtres sera fermé sous peu,
transféré en Grande-Bretagne. Face à cela, les instruments à disposition sont,
pour l’instant, peu performants. L’internationale syndicale dont fait partie comedia, UNI, n’a été d’aucun secours. L’UITA a apporté son
soutien, mais ses rythmes sont en décalage avec celle d’une grève, dont le sort
peut se décider d’un jour à l’autre. Le groupe Bunzl est censé être doté d’un
comité d’entreprise européen, mais il a été impossible de saisir ce dernier à
temps. Le décalage entre le degré de centralisation internationale des
stratégies patronales et l’éclatement des réseaux syndicaux ne saurait être
plus frappant… et pesant.
Reste qu’il est indispensable d’apprendre de cette
expérience. La restructuration internationale de Filtrona n’est de loin pas
achevée. A Crissier, l’accord accepté le 26 janvier ne marque qu’une
étape. Il faudra veiller à son respect. Le sort des emplois de l’usine de
Crissier reste un enjeu. La collaboration syndicale internationale peut – et
doit – encore jouer un rôle.
La rencontre du 29 janvier a permis de nouer des
contacts importants. Il faut espérer qu’ils seront une base pour franchir un
palier dans la capacité d’agir internationale, dans les semaines à venir. (JFM)