Irak-Liban

Général Petraeus

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La situation en Irak et au Liban *

Entretien avec Gilbert Achcar *

Le commandant en chef des troupes américaines en Irak, le général Petraeus, une fois faites des déclarations «optimistes» sur l’offensive contre les forces d’Al-Qaida, se doit de reconnaître devant les caméras de la chaîne de télévision ultra-réactionnaire Fox News que la situation est des plus difficile en Irak. Il va jusqu’à affirmer: «Presque tous reconnaissent qu’une situation comme celle-là, avec les très nombreux défis que doit relever l’Irak, ne sera pas résolue en une année, ni même deux. En fait, typiquement, je pense de façon historique, les opérations de contre-insurrection ont duré au moins neuf ou dix ans. La question est, bien sûr, avec quelle intensité.»

Les conflits interconfessionnels sont avivés. Les attaques contre les mosquées en étant l’expression la plus visible et choquante.

L’échec de l’intervention américaine est patent. Le prix payé par la population irakienne est au-delà de toutes les prévisions. Les réfugié.e.s internes et externes se comptent par millions. A la lumière de ces «faits», plus d’un journaliste se devrait de relire les articles commis lors du déclenchement de la guerre, qui saluaient la volonté démocratique de Bush, et devraient manifester aujourd’hui plus de précaution quant à la concrétisation d’un échéancier précis – dans le climat électoral des Etats-Unis – sur le retrait des troupes d’occupation de l’Irak. (réd.)

 

Depuis le printemps 2007, l’état-major américain vante les mérites de la montée en puissance («surge») de la présence des troupes états-uniennes en Irak et plus spécialement à Bagdad. Qu’en est-il ?

Gilbert Achcar - Cela a surtout été un "surge" du bain de sang et un échec majeur, si nous le mesurions par rapport à l'objectif que s'est fixé l'administration Bush, qui n'était rien de moins que de transformer tout le gâchis irakien en un succès. C'est ce qu'elle a essayé d'accomplir avec la montée en puissance (envoi de 21'000 soldats supplémentaires et prolongation du maintien de soldats devant rentrer aux Etas-Unis) en fait surtout par des opérations de propagande. Mais l'échec est patent.

L'objectif principal était de créer des conditions qui permettraient aux forces d'occupation de modifier les alignements politiques en Irak et de mettre sur pied une nouvelle alliance qui aurait été très proche des Etats-Unis et qui aurait permis à Washington de manœuvrer plus facilement dans le pays. Moqtada al-Sadr était la principale cible de toute cette opération, et nous pouvons en mesurer l'échec par le fait qu'il est actuellement de retour, et de manière très prééminente, dans les nouvelles, après avoir disparu pendant une période.

Que signifie sa re-émergence ?

Je la vois surtout comme une indication de l'échec du soi-disant "surge". En sachant que cette opération le visait, al-Sadr s'est caché et a ordonné à ses partisans d'adopter un profil bas et d'éviter toute confrontation directe avec les troupes états-uniennes. Il n'allait pas entrer en collision frontale avec les forces états-uniennes comme il l'avait fait en 2004, à un prix très élevé. A cette époque, il avait failli être arrêté ou tué, et son mouvement militairement écrasé. Il a donc soigneusement évité de répéter cette stratégie.

Il a compris une leçon très élémentaire, à savoir qu'il ne devait pas affronter les Etats-Unis militairement de manière frontale, puisqu'ils disposent d'une puissance de feu et d'un armement écrasant. Il vaut mieux, lorsqu'ils attaquent, se retirer à un lieu sûr, ou même se cacher. C'est là une tactique de guérilla élémentaire ­ et les sadristes l'ont appliquée avec un certain succès, tout en parvenant à manœuvrer de manière assez astucieuse pour maintenir leur puissance sur le plan politique et même pour l'augmenter, alors que la haine envers les troupes états-uniennes augmentait suite au "surge".

Récemment il a fait un discours dont la tonalité était plus nationaliste et anti-sectaire. Est-ce là un indice de changement ?

Je pense qu'il est probablement arrivé à la conclusion qu'il était temps pour lui de renouveler sa ligne politique ou de reprendre celle qu'il avait suivie jusqu'à la fin 2005 ou début 2006. L'attaque de Samarra de février 2006 [une attaque sectaire dévastatrice des Sunnites contre la mosquée chiite de cette localité] a été un point tournant dans la situation irakienne. C'est à ce moment que l'image de al-Sadr, qui apparaissait comme non-sectaire et nationaliste arabe et irakien, s'est modifiée pour devenir celle d'un dirigeant des milices sectaires chiites.

Maintenant il est en train d'essayer de restaurer son image précédente. Il estime probablement que le contexte se prête bien à une nouvelle tentative, après plus d'une année durant laquelle les Chiites se sont défoulés très intensivement sur le plan sectaire pour riposter aux attaques sectaires qu'ils avaient eux-mêmes subies.

Vous êtes en train de dire que l'escalade dans les attaques et contre-attaques arriverait à son terme et que Moqtada al-Sadr pourrait revenir à un discours plus nationaliste ?

Oui, exactement. Il estime probablement que les choses peuvent se calmer maintenant, à un moment où il devient urgent pour lui d'améliorer son image. Il a besoin de s'adresser aux Irakiens arabes sunnites, parce qu'il comprend qu'une opération politique majeure se déroule, dont il est une cible.

Les deux dirigeants kurdes ont récemment lancé des déclarations contre la menace de complot visant à renverser le gouvernement Maliki. L'autre pe